Contrecoup / M. CASSIS & F. ARMONIE
Je connaissais les autrices avec des plumes séparées et j'étais curieuse de les découvrir réunies. Et c'est tout naturellement que j'ai postulé pour découvrir, en avant-première, leur livre à 4 mains "Contrecoup". Et quelle découverte qui, malgré une ou deux petites choses, est un très joli coup de ♥ dans le genre romance psychologique. Merci Maloria et Flora de m'avoir associée à cette belle aventure qui vous voit prendre votre envol de toute autre manière.
Attention : les auteures l'ont clairement signalé. Ce roman peut choquer les âmes sensibles par des faits qu'il met en scène de manière explicite.
Dernière année de lycée au pensionnat Saint Antoine pour Enora avant de pouvoir tourner la page de 2 ans de mise à l'écart sociale, sans savoir pourquoi. Le responsable ? Léonard, celui avec qui elle a grandi, qui était son meilleur ami, son confident, son tout jusqu'à ce qu'il ne lui parle plus, sans explication. Et qu'il fasse de sa vie, celle d'une paria dans son lycée.
« Parce que lui et moi n’avons jamais vraiment eu besoin de mots pour nous comprendre. Chacun captait l’humeur de l’aute par un simple regard. Comme s’il existait une sorte de connexion entre nous. Je ne le déteste que davantage de réussir à m’attendrir sans être là, rien que par des réminiscences du passé »
Jusqu'à l'arrivée d'un nouveau lycéen, Jaimie, qui va passer outre l'interdiction d'approcher Enora et qui va décider qu'elle sera, au contraire, sa meilleure amie. Et qui va s'accrocher fermement. Bien entendu, tout ne va pas être simple et va faire réagir Léonard de manière bien étrange.
Que cache Léonard derrière un comportement aussi incompréhensible pour Enora ?
Grâce à Jaimie, sera-t-il possible qu'Enora retrouve le sourire et un semblant de vie ?
Alors autant dire que Maloria et Flora ont frappé fort pour cet écrit à 4 mains. On oublie les histoires de mecs sexy bodybuildés ou les macarons à la pistache de Maloria et les mignons animaux de Flore. Car là, elles ont choisi un sujet osé et délicat pour un résultat parfaitement abouti nous emmenant entre dark romance et romance psychologique.
Au premier abord, l'histoire peut sembler étrange ; surtout avec Léonard qui, par son comportement, tire les ficelles de la vie d'Enora. J'avoue que j'ai eu beaucoup de mal à le cerner, à le comprendre et à le trouver, un tant soit peu, attrayant ; surtout au tout début.
Enora et Leonard ont grandi ensemble dans un univers plutôt aisé – école privé, voiture avec chauffeur, uniforme, etc… - ; leurs parents étant proches. Tellement fusionnels qu'on pourrait presque dire qu'entre eux c'était "à la vie, à la mort". Mais quelque chose s'est brisé et c'est Enora qui en a fait les frais.
« Nous sommes passés d’une amitié forte , ou bizarre pour certains tant nous étions liés, au néant »
Maloria et Flora ont construit une histoire complexe mais tellement addictive. Celle d'une belle amitié enfantine où l'un des deux est un vrai pilier pour l'autre. Ce qu'on sait d'eux c'est que le pilier, c'était Léonard. Il a toujours répondu présent, de jour comme de nuit, dans les moments particulièrement difficiles notamment lors des cauchemars récurrents qu'Enora fait depuis son plus jeune âge et que ses parents semblent minimiser. Seul Léonard, malgré son impuissance, faisait tout pour l'aider. Mais ça c'était avant.
"La respiration coupée et le coeur battant à toute allure. Inutile de jeter un oeil au réveil. Comme toutes les nuits, il est 3 h 37"
Qu'est-ce qu'une écriture commune a apporté à cette histoire ? Aucune idée car impossible de savoir qui a eu l'idée de quoi. En tout cas, elle m'a apporté une belle palette émotionnelle. La jeunesse des personnages, leur complexité, leur vécu déjà si intense et poignant m'ont balloter entre compassion, tristesse, horreur voire dégoût mais aussi gaieté et espoir.
Espoir car il faut forcément en avoir dans un tel contexte. Car les auteures se gardent bien de tout nous offrir sur un plateau ; elles nous laissent mijoter le temps de mettre le puzzle en ordre. Et pas un petit puzzle, c'est clair !
La jeunesse des personnages fait que l'on pourrait émettre une certaine réserve sur leurs réactions et leurs choix. Je pense notamment à Enora qui soulèvera certainement des avis mitigés quant à la passivité dont elle semble faire preuve parfois (ou le romantisme un peu trop fleur bleue). Un mot ou un geste de Léonard et hop elle serait prête à tout oublier. Mais n'oublions pas qu'elle est déstabilisée par la rupture brutale de son amitié, par les cauchemars qui reviennent chaque nuit selon un rythme parfaitement réglé et par des messages qu'elle reçoit d'un parfait inconnu, Stalker et qui lui permettent de penser que, finalement, il y a quelqu'un quelque part qui n'a rien à lui reprocher. Et elle a le droit d'y croire encore tant que rien n'est définitivement perdu.
« Pourquoi ne puis-je pas rester insensible ? A croire que mon cœur et mon corps n’ont pas reçu l’information en provenance de mon cerveau indiquant que nous détestons Léonard ELLORI »
Lorsqu'il s'agit d'évoquer Léonard, l'exercice est plus difficile. Image même de celui qui souffle le chaud et le froid (voire glacial). Doit-on l'aimer, doit-on le détester ? Difficile à dire vu l'évolution de son personnage au fil des pages. Heureusement les auteures ont su le rendre abordable dans le sens où certains chapitres reviennent sur son jeune passé - entre 13 et 15 ans - et quel passé ! Il m'en faut beaucoup pour être choquée mais là on était limite, notamment lorsqu'il a 15 ans. Sa façon de parler et de se comporter m'a "interpellée". J'ai compris le pourquoi de ce style mais tout de même... Bien qu'il a 18 ans, il reste un enfant qui a encore besoin de repères familiaux ; de ce côté-là, il n'a pas été gâté, soyons lucides. Il a grandi beaucoup trop vite avec une maturité malgré tout défaillante.
« Vu la richesse de ma famille, il est fort probable qu’un jour une femme tente de me piéger. Ainsi, je prends toutes le mesures de précautions nécessaires »
Dans ce roman, le personnage de Jaimie est mon personnage coup de cœur. Il est gentil, ouvert, attachant, généreux, persévérant, n'a pas froid aux yeux quand il s'agit de voler au secours d'Enora. C'est un peu le chevalier en armure blanche des temps modernes. Il porte vraiment l'histoire, d'un bout à l'autre, cimentant tous les événements et personnages entre eux. J'ai tout aimé de lui : sa façon d'être, sa façon de parler, cette nonchalance parfois qui allège le côté sombre que peut amener l'histoire.
« Ben, je n’avais pas froid et j’ai le chauffage donc cette fille ne m’était d’aucune utilité »
Ce côté sombre est entretenu aussi par des familles qui feront toujours passer leurs intérêts sociaux avant leurs proches, même dans les moments les plus vils. J'avoue que là, les familles ont été correctement travaillées par les auteures et ça renforce forcément l'intrigue de base pour l'entretenir.
« Arrête tes gamineries maintenant. Tu es une grande fille, tu dois apprendre à surmonter tes peurs. Cesse de te laisser impressionner par ton imagination et grandis ! »
Ce roman comporte, bien entendu, des zones d'ombres sinon ça n'aurait aucun intérêt. Malheureusement, j'ai assez vite compris certaines choses notamment l'identité de Stalker et une partie de l'intrigue que j'ai vu venir assez tôt. Par contre, la grosse zone d'ombre concernant Jaimie m'a laissée frustrée sur la fin. J'avais déjà tout prévu dans mon esprit et hop, rien ne nous est vraiment dévoilé. Donc, il faut s'attendre à ce que les auteures aient agi volontairement pour mieux revenir bientôt.
« Je l’attendais ce message. Avant chaque entraînement et avant et après chaque match, mon messager de l’ombre m’envoie un petit mot. J’ai eu peur que cette routine s’arrêtre. J’ai peu d’amis, mais peu importe la forme qu’ils prennent, ils me sont essentiels. Mon Stalker également »
Comme je dis souvent lorsqu'on critique mes coups de cœur, ce n'est pas parce qu'il y a quelques faiblesses dans une histoire que ça lui enlève le droit à être classée en coup de cœur malgré tout. Il y a les mégas coups de cœur, les beaux coups de cœur et les jolis coups de cœur.
Alors parce que les deux plumes associées, de Maloria et Flora, donnent une belle unité à cette histoire et qu'elles méritent d'être lues autant ensemble que séparément, je ne peux que recommander ce livre qui fait partie de ceux à avoir dans sa bibliothèque.
Depuis que le monde est monde, il y a des partisans et des détracteurs : la littérature ne fait pas exception. De manière sûre et certaine, je fais partie de la Team Enora & Leonard.
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