Mille livres en tête

Mille livres en tête

Le silence des braseros / Miguël LECOMTE

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Flippant, déroutant et tellement intrigant ! Mais finalement, une très belle expérience. Autant dire les choses clairement : ce roman m'a retourné le cerveau et ça n'est pas exagéré du tout ! Merci aux Editions Sharon Kena pour leur confiance et pour m'avoir fait sortir de ma zone de confort comme jamais. Quelle expérience livresque qui a mis à mal mon esprit assez cartésien !


1986 : Une famille - le père, la mère et leur jeune fils - qui quitte tout pour démarrer une nouvelle vie à Greenwich Village. 2002 : Bien des années après, alors que la famille s'est agrandie, des choses étranges style Poltergeist surviennent et un événement tragique frappe la famille. 2010 : l'histoire - telle qu'elle va nous accompagner jusqu'à la fin - commence avec une intrigue encore plus intrigante qui se profile et se développe. Voilà pour ce qu'il en est d'un bref aperçu de ce roman qui m'a donné des sueurs froides sur bien des aspects. Bienvenue dans un univers où l'inimaginable pourrait bien se réaliser et où la noirceur de l’âme humaine pourrait impacter un monde qui n'aurait plus rien d'idéal !

 

"Les gens qui nous quittent restent à jamais dans nos cœurs ; c'est à cet endroit qu'il faut les chercher pour trouver la paix. Leur dernière volonté est notre bonheur à venir, et le souvenir de leur visage souriant nous donne de la force, présageant le vœu que nous nous retrouverons peut-être... un jour"


Je dois être honnête, j'avoue que j'ai eu un peu de mal avec la lecture d'une partie de ce roman qui m'attirait vraiment mais dont je pense avoir mal évalué le contenu réel basé sur un incroyable stratagème très sombre et sur une folie à la limite du fanatique. A plus d'une reprise je me suis fait peur au point que je n'ai plus pu lire ce livre avant de dormir le soir... et pourtant je ne suis pas quelqu'un qui a peur facilement.

 

"Quoi que l'homme en pense, la terre ne lui appartient pas. Il est redevable et minuscule"


Le contexte de la première partie de l'histoire est vraiment étrange avec toute une partie qui m'a laissée dans le flou le plus total quant à la direction dans laquelle voulait m'emmener l'auteur. Il n'y a pourtant pas énormément de personnages mais je pense que la temporalité narrative m'a un peu décontenancée. Et puis je ne maîtrise pas du tout ce genre auquel je ne m'attendais pas. Au final, de manière assez peu commune, l'auteur posait simplement les bases de son histoire, ni plus ni moins.


Je ne vais pas m'attarder de trop sur les personnages puisqu'il y a un fort risque de spoiler mais quelle imagination dont a fait preuve l'auteur pour en imaginer certains et pour gérer une telle diversité. On pourrait s'attendre à quelque chose de classique mais pas du tout. Certains représentent le Bien, d'autres le Mal et la lectrice que je suis s'est retrouvée un peu malmenée, prise entre ces deux entités totalement opposées qui jalonnent le roman, faisant parfois naître le doute en moi sur leur réel rôle.

 

« Le temps n’est pas Dieu, le temps est humain »


Pour qui n'est pas rompu à ce genre de lecture, comme moi, il faut vraiment un certain temps d'adaptation pour appréhender des notions qui ne conviennent peut-être pas à tout le monde. Celle de suspense n'est pas traitée comme on pourrait s'y attendre car elle se présente sous une forme qui côtoie le paranormal, le scientifique et l'apocalyptique. Autant dire, des aspects littéraires auxquels je ne m'étais pas préparée.


De même que celle de romance annoncée, n'a rien de comparable à la contemporaine à laquelle je suis habituée. D'ailleurs, je suis assez surprise que ce soit un thème mis en avant car, personnellement, vu le peu de développement dans l'histoire, je n'ai pas été convaincue plus que ça. Hormis le fait que ça puisse servir, effectivement, l'issue du récit.


L'histoire est super bien écrite – avec une narration à la 3ème personne -, j'ai adoré le style de cet auteur. Franchement, c'est un très gros point positif en ce qui me concerne parce que lorsqu'on plonge dans un tel univers, dirigé par l'orgueil et la suffisance d'un seul homme, il vaut mieux. Et quel talent pour imaginer un tel scénario et pour l’étoffer de tant de détails si bien associés les uns aux autres !

 

"Je suis tout et je ne suis rien, infiniment grand comme infiniment petit. Je suis un rêve et une réalité"


5.pngMême si je ressors convaincue par cette histoire et par le talent de son auteur, il y a quand même un point qui m'a énormément dérangée : la longueur inégale des chapitres qui pour certains faisaient presque 70 pages - 2 chapitres il me semble -. Dans un univers littéraire tel que celui-là, c'est une très grosse prise de risque lorsque des novices, comme moi, se plongent dedans. Ma lecture s'est donc trouvée impactée dans le temps et mon ressenti, pendant un temps, probablement aussi.

 

Je dois reconnaître que, jusqu'à la moitié de l'histoire, j'ai été prise d'un grand doute quant à la poursuite de cette lecture. Je n'avais pas saisi les codes mis en place par l'auteur - qui sont peut-être habituels dans ce genre - et ça perturbait ma découverte de ce roman mais aussi ma réflexion de lectrice qui n'est probablement pas en mesure de s'adapter à tous les genres. Mais au final, une fois tous les éléments en main, je suis ressortie assez fière d’avoir mené l’histoire à son terme et d’en avoir saisi le sens malgré un début un peu compliqué.

 

« La réalité… qui peut prétendre savoir ce qui est réel de ce qui ne l’est pas ? Qu’est-ce que le réel ? »

 

Lorsqu'on termine ce roman, une fois toutes les pièces du puzzle dévoilées, tout se met clairement en place et on ne peut que saluer l'ingéniosité de l'ensemble qui force à réfléchir sur pas mal de sujets soulevés par l'auteur. Le flou qui s'était insinué laisse place à une belle évidence et cohérence - même si certains aspects resteront un mystère pour moi - et l'histoire prend vraiment tout son sens, surtout avec un final tel que celui qui nous attend. Comme on dit "mieux vaut tard que jamais".

 

« Lorsque l’homme aura coupé le dernier arbre, pollué la dernière goutte d’eau, tué le dernier animal et pêché le dernier poisson, alors il se rendra compte que l’argent n’est pas comestible »

 

9.pngC’est donc avec une lecture plus que particulière que j’ai repoussé mes limites de lectrice et je suis vraiment ravie de l’avoir fait même si c’était de manière si extrême. Alors non mon avis n’est pas parfait mais trop confortablement installée dans un genre depuis de nombreuses années, « Le silence des braseros » m’a permis de découvrir toute autre chose et de me mettre à l’épreuve pour voir jusqu’à quel point je pouvais me plonger, sans préparation, dans l’inconnu. Si vous voulez changer vos habitudes, vous essayer à un tout autre univers et que l’inconnu et le sombre ne vous font pas peur,  alors je vous recommande ce roman qui sort de mes sentiers battus et qui sortira peut-être aussi des vôtres pour une expérience inédite et mémorable. Alors très belle lecture !



07/07/2024
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