Mille livres en tête

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Top to Bottom / Emilie COLLINS

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Emilie COLLINS est une valeur sûre dans l'univers de la romance française. Je la suis depuis ses débuts et je suis au rendez-vous de toutes ses sorties (hormis une qu'il me reste à lire). Je l'apprécie autant en tant qu'écrivain qu'en tant que la femme douce et généreuse qu'elle est.

 

Merci aux Éditions BMR et Netgalley de m'avoir permis de découvrir Top to bottom sous Service Presse.

 

C'est avec une joie certaine que j'ai retrouvée Alexia, dite Lex même si elle n'est pas dans une très bonne période. Styliste talentueuse, travaillant dans la boutique de sa mère, Lex a perdu l'inspiration créative. Pourquoi dis-je « retrouvée » ? Car pour les lectrices qui suivent Emilie, Lex n'est pas une inconnue puisqu'elle est la sœur de Romy dans Cœur à corps - celle qui crée des bijoux et qui est en couple avec Erik le photographe -.

 

Cette panne créative pèse sur le moral de Lex et sur ses relations. Notamment celle avec Sadie, jeune graffeur talentueux et meilleur ami d'Erik, qui l'insupporte un peu, beaucoup. Lorsque Lex décide de prendre du recul en partant à l'aventure, ses pas et sa quête d'inspiration pourraient bien lui apporter bien plus que ce qu'elle cherchait au départ. Et Sandie pourrait bien se révéler sous une autre facette.

 

Sandie saura-t-il sauver Lex des souvenirs douloureux du passé ?

Lex aura-t-elle la force d’affronter et d’accepter les tourments qui animent Sandie ?  

 

Je l'ai peut-être déjà dis mais je le dis encore ici : Emilie COLLINS est une poétesse et une magicienne des mots et des émotions. A chaque nouveau roman, elle m'embarque avec elle, avec une facilité déconcertante. Un univers différent à chaque fois mais ça matche à tous les coups entre ses personnages, leurs univers et moi. Quel bonheur de la retrouver !

 

C'est à force de poésie qu'Emilie nous emmène à chaque fois dans le monde de l'art sous toutes ses formes : un thème qui semble lui tenir à cœur et qu'elle maîtrise avec subtilité, tendresse et douceur. Du pur Emilie Collins comme j'aime.

 

Cœur à corps mettait en scène le personnage de Romane - Romy -, créatrice de bijoux. Top to Bottom nous permet de découvrir, de manière plus intime, Alexia la sœur aînée. Mais aussi de retrouver plein de personnages découverts dans les précédents romans de cette talentueuse auteure (Les délices d'Eve, Cœur à corps, Notre part de magie).

 

Cette très belle histoire nous immerge, en alternance de point de vue, dans la vie de deux artistes que tout semble opposer. Lex crée de sublimes vêtements et à un caractère posé et discret ; Sadie réalise de magnifiques fresques avec cet art tantôt décrié, tantôt reconnu et souvent considéré comme répréhensible, qu'est le Street Art comme moyen d'exprimer une certaine révolte qui l'habite.

 

"C'est assez étrange de pouvoir explorer une semi-ruine parce qu'on a le droit d'être là"

 

Car révolté il a des raisons de l’être : à la loterie de la vie il n’a pas vraiment gagné le meilleur lot. Il a grandi sans père, sans l’amour de sa mère présente seulement pour le brimer continuellement, le considérant comme un fardeau ; et avec un secret qui le ronge de l’intérieur petit à petit et face auquel il assiste impuissant à une issue irréversible. Seule sa passion et son talent pour le Street Art comble ce vide émotionnel auprès de cette famille de cœur que composent tous les graffeurs qu’il côtoie dans cet univers où chacun vient et accepte l’autre avec ses différences mais avec le même amour du Street Art. Les liens du sang n’ayant aucune signification pour lui, des liens du cœur l’unissent aussi de manière très forte à Erik qu’il considère comme son frère de cœur. Et quel plaisir de découvrir leur histoire de manière plus approfondie !

 

« C’est pas du griffonage, Lex, c’est un cri de révolte. Pour avoir le droit de demander autre chose que ce que l’on veut nous imposer comme unique voie. Je veux avoir de la place pour exprimer et vivre ce que je choisis »

 

Contrairement à lui, pour Lex les liens du sang ont une signification puissante puisque sa famille est son pilier. Lorsque Lex est vraiment dans une détresse profonde et que le bonheur semble avoir oublié de s'arrêter dans sa vie, contrairement à toutes les femmes qui l'entourent, cette notion familiale est plus forte que jamais. Elle n’est pas confortée dans sa chute mais bien tirée vers le haut de manière efficace, reconnaissons-le. L'écriture d'Émilie nous décrit ses ressentis et son évolution de manière tellement réaliste que la peine que l’on peut ressentir se transforme au fil de la lecture.

 

"Je sais qu'elles sont là, elles sont toujours là. Je ne sais pas depuis quand je ne vais pas bien, ni pourquoi. Je ne savais pas que j'avais besoin d'aide"

 

Même si elle n'est pas habituée aux imprévus,  Lex a une certaine fierté qui va la pousser à se montrer réactive en acceptant un défi de taille. Et quelque part, ça rassure même si l'inconnu total nous attend comme elle. Dans ce roman, l'inconnu n'est pas forcément de celui qui fait peur. Comme toujours, Émilie insuffle de la positivité et de la couleur à des situations délicates et à ses personnages. Là où tout semble les séparer, leurs chemins vont trouver un croisement qui leur offre la possibilité de se découvrir enfin tels qu'ils sont réellement ; avec leurs forces et leurs faiblesses respectives. Et d’envisager une reconstruction ensemble même si le chemin sera semé d’embûches. Mais qui a dit que tout est facile dans la vie ?

 

"Tu fais ta valise, tu files à l'aéroport avec ton passeport, et tu montes dans le premier avion qui décolle"

 

Entre Lex et Sadie, on ne va pas se mentir : rien n’est gagné d’avance. Leur relation se résume, dans un premier temps, à de belles joutes verbales qui illustrent bien l'expression "Qui aime bien châtie bien", à des surnoms surprenants et à des échanges piquants qui frôlent la provocation. Mais au fil des chapitres, c'est bien plus que ça qui prend naissance et grandit sous nos yeux de manière tellement touchante. Plus les pages se tournent, plus le ton change,  plus les vérités émergent et plus on se dit que sous le ton humoristique parfois, se cache quelque chose de plus douloureux et profond.

 

« J’ai passé une partie de l’après-midi à t’imaginer nue et enduite d’huile. Je pourrais te dire que j’ai envie de voir à quoi ressemble ton corps et connaître la douceur de ta peau. Et te dire que j’ai envie de dénouer tes cheveux et découvrir chacune de tes courbes du bout des lèvres. Arrête-moi Lex »

 

Car sous couvert d'une belle romance, ponctuée d’éclats de rire, de complicité et d’une belle connexion entre eux, l'auteur traite de sujets forts qui touchent Lex et Sadie. Les douleurs du passé impactent leur présent et pour certaines, elles sont de taille. Et on ne peut qu'être touchés. Surtout dès lors que ça interfère avec leurs sentiments, leurs décisions et donc dans leur relation.

 

« Quand détruire est ce qui permet d’envisager de reconstruire »

 

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Mais heureusement, ce ne sont pas des personnages éteints et ils sont plein de qualités. Surtout Sadie qui est doux, patient, attentionné avec un humour bien agréable à lire. Et ils sont bien entourés par des personnages secondaires éclectiques, de qualité, qui redonnent de l’espoir et un peu de légèreté supplémentaire à l’histoire. Histoire qui est une belle ode à la femme et à la féminité ; ces femmes qui, majoritairement, portent ce roman d’un bout à l’autre au fil des rencontres qu’elles illuminent. Et c’est à ce point qu’on reconnaît le style d’Emilie COLLINS qui fait se croiser tant de personnages d’horizons différents mais avec un même point commun : l’amour de l’autre. Ses personnages sont toujours bienveillants avec une belle part d’empathie ; rares sont ceux qui ont un mauvais fond et du négatif en eux.  

 

Ce qui caractérise aussi cette auteure, c’est sa capacité à nous faire voyager à des milliers de kilomètres sans avoir à craindre une phobie de l’avion. J’avais eu un réel coup de cœur pour son tout premier roman, « L’autre chemin » qui m’avait transporté au Sri Lanka. Et là, c’est une nouvelle invitation au voyage qu’elle propose en découvrant, en autre, la belle ville d’Istanbul, avec ses monuments dépaysants, ses habitants accueillants, ses couleurs chatoyantes et ses odeurs odorantes. Il y a juste à suivre le guide.

 

« Puisqu’on ne peut pas changer le passé, construisons le présent et l’avenir autrement »

 

Enfin, Emilie donne à cet art assez méconnu et incompris qu’est le Street Art, toutes ses « lettres de noblesse » et la place légitime qui est en train de lui revenir. N’est pas graffeur, qui le veut seulement par improvisation  - Sadie ayant quand même fait les Beaux-Arts, s’il vous plaît -. C’est un art de vivre et une mentalité particulière ; et ça requiert beaucoup de talent. Dans ce roman, le sujet est parfaitement traité pour se rendre compte de sa dimension et on sent bien qu’Emilie a profondément travaillé sur le sujet en s’entourant de spécialistes hautement talentueux pour en parler avec tant de passion. Et forcément, ça donne envie d’en découvrir plus au-delà de l’histoire de Lex et Sadie.

 

Emilie COLLINS est une auteure inimitable car elle écrit avec beaucoup de sensibilité et de justesse. Et sa plume est comme toujours juste parfaite ; je trouve même que dans Top of Bottom on gagne un petit plus en sensualité. Peut-être que je me trompe Clin d'œil

 

Alors si vous voulez une histoire pleine d’émotion et de sentiments hétéroclites, qui véhicule des messages forts sans enjoliver la réalité et qui vous fait voyager sans sortir votre passeport, alors installez-vous confortablement pour découvrir en quelques heures seulement, ce roman qui, j’en suis certaine, ne sera pas le dernier – puisque Mel n’a pas eu son histoire - avec lequel nous enchantera Emilie.



07/06/2020
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